J’ai ENFIN fini Shadow of the Colossus

Ça y est. Après dix-huit ans, j’ai fini SOTC (sur le remake). J’attendais de battre le dernier colosse pour faire cet article, mais ça fait un moment que je voulais écrire sur le sujet.

« Seulement maintenant ? »

Eh bien, comme je le disais dans mon article sur Ico, SOTC et moi n’a jamais été une grande histoire d’amour avant 2024.

Pourtant, j’ai eu le jeu à sa sortie européenne en 2005. Énorme fan de Ico, que je considérais comme un chef-d’oeuvre (eu également peu de temps après sa sortie en 2002), je l’avais attendu de pied ferme… pour, en fin de compte, le délaisser très vite, et revenir dessus de façon sporadique pendant les quelques années qui ont suivi – jusqu’à abandonner pour de bon au 7e ou 8e colosse, je ne sais plus.

Les raisons ? Je ne retrouvais pas ce qui m’avait fait tant apprécier Ico, puzzle game où l’on doit trouver son chemin dans une immense forteresse, dans le but de s’en échapper avec une jeune fille également prisonnière. Là où Ico avait une progression linéaire, où chaque pas vous rapproche du Graal – la sortie du château – en vous faisant découvrir de nouvelles pièces, de nouveaux ponts, de nouveaux jardins au fur et à mesure, SOTC est un monde ouvert. Exit la sensation « d’avancer » : on cherche le colosse sur la map, on lui plante l’épée dans le crâne, on tombe dans les pommes et retour au point de départ, où Dormin vous donne un indice sur le prochain ennemi. Encore et toujours : après chaque colosse, on revient au point de départ, le temple. Ça me dérangeait profondément, n’ayant pas l’impression d’avancer, de découvrir quelque chose (il n’y a pas non plus de cinématique, à part sur la fin, qui vienne troubler cette monotonie).

On aurait pu penser que je puisse prendre du plaisir à me balader dans les immenses paysages, mais… non, je m’étais bien vite lassée. D’abord parce que je me perdais (horriblement frustrant quand on ne comprend pas où le rayon de lumière veut qu’on aille), et parce que le /vide/ des décors ne me poussait pas à explorer.

Non, parce qu’il faut bien le dire : la map sur la version PS2 est affreusement vide. Je sais que c’est le but, le jeu se concentrant autour des colosses, mais c’était. vraaaaaiment. vide. Ajoutons à cela les affreux drops de FPS, la lenteur du personnage (version PAL, tout ça…), le cheval difficile à manier… c’était beaucoup de frustration pour mon moi de douze ans. Alors quand on n’aime pas se battre contre les colosses (pour moi, le fait qu’il n’y ait que ça à faire et que le jeu soit une succession de boss était une hé-ré-sie), eh bien, il ne reste… pas grand-chose.

Pourtant, j’y retournais de temps en temps. Ça me frustrait un peu de savoir que je ne finirais jamais le jeu, et en même temps, je n’avais absolument aucune envie de me coltiner les colosses restants (de plus, je me disais que j’étais bien trop mauvaise pour les battre). Puis j’ai abandonné.

Pendant ce temps, les articles et les avis dithyrambiques sur le jeu se multipliaient, notamment avec la ressortie sur PS3; « meilleur jeu » « oeuvre d’art », etc. À force j’ai fini par me dire, bon sang, je crois que je rate un truc. Ou que les gens voient quelque chose que je ne vois pas. J’ai fini par comprendre, à force de semi-spoilers, que le jeu était censé te faire culpabiliser de tuer les colosses et que c’était en fin de compte une tragédie… mais comme je ne fais que m’énerver sur les colosses, j’avoue ne pas ressentir une once de pitié pour eux et le jeu n’avait que l’allure d’un boss rush à mes yeux.

En fait, pour moi, SOTC était « un jeu classique ». Là où Ico n’avait presque pas de combats et reposait entièrement sur des mécaniques de puzzle, sans boss (à part le boss final, qui ne demande pas énormément d’énergie), SOTC était un jeu de bagarre et, à ma colossale (mdr) déception, il marchait beaucoup mieux que Ico auprès du public. Les hommes de mon entourage me disaient : « oui, Ico, c’est sympa mais on se fait chier, mais bon sang, SOTC, quelle claque ». Ah, c’est bien les mecs, ça, ils ont des trucs à taper ils sont contents ! Chose amusante lorsqu’on sait que Ueda avait surnommé son projet SOTC « the man game » et son prochain projet de puzzle-game, The Last Guardian, comme « the woman game ».

Apparemment, Ico n’avait pas très bien fonctionné car il n’était pas assez « direct » dans sa démarche, et il était difficile de montrer aux joueurs le but du jeu lorsqu’ils en ont fait la promotion ; Ueda a donc changé de tactique pour son second jeu, avec une approche bien plus directe : regardez, gros monstres. Et ça a marché… mais pas pour moi, du coup ! Là où certains ont eu du mal à rentrer dans Ico mais ont accroché tout de suite au concept de SOTC, il m’a fallu beaucoup d’efforts pour rentrer dans SOTC et comprendre où le jeu voulait en venir.

Bref, j’ai donc fini par me spoiler délibérément la fin. Ah. D’accord, ça c’est stylé. Ben voilà. Si on m’avait dit ça plus tôt, aussi !

Suite à ça, je me suis dit, allez. Quand même, ce serait cool de voir la fin par moi-même et aller jusqu’au bout, ou au moins essayer, et j’ai repris le remake (que j’avais commencé vers 2020 mais abandonné après avoir ragé comme un goret, encore une fois !). Et là… ça a été beaucoup mieux. Je ne sais pas quel genre de déclic j’ai eu, mais pour la première fois, j’ai pris du plaisir à jouer.

Non, en fait, je sais très bien pourquoi : j’ai passé mon temps à fouiller les décors et prendre des photos au lieu d’aller d’un colosse à l’autre, mettant le plus de temps possible entre moi et les boss. Il faut dire que le remake est une claque graphique qui en met plein les yeux : voilà, là, ça donne envie de se promener. C’est drôle, parce que je suis du genre partisan du retrogaming et de « la vision d’auteur », mais dans le cas de SOTC, le remake a clairement apporté une dimension supplémentaire à mon expérience de jeu pour la rendre moins négative : les décors sont superbes, les FPS sont stables, et les contrôles moins rigides, tout en restant fidèle au feeling de l’original (je tire mon chapeau, Bluepoint).

Ajoutons à cela les « 79 steps to enlightenment », de petites loupiotes rajoutées par le remake en hommage aux forumeurs qui ont poncé le jeu pendant des années dans l’espoir de découvrir un secret caché. Ces « bling-bling » comme je les appelle ne mènent à aucun trophée (mais à quelque chose de concret dans le jeu), ne sont référencés nulle part – un vrai secret de jeu vidéo à l’ancienne, bien qu’avec Internet, des guides pour les collecter soient rapidement apparus. Au début, je les trouvais par hasard, mais au fur et à mesure, je me suis prise au jeu et je me demande combien je peux en trouver par moi-même (25/79 au moment où j’écris ces lignes). Pour moi, ce n’est pas une corvée en mode « il faut toutes les trouver » (ça n’a jamais été le but), mais une façon de s’amuser supplémentaire, surtout lorsqu’on commence à comprendre la logique de leur placement.

En fait, ça me rappelle quand je passais mon temps à risquer le out-of-bounds dans les anciens jeux enfant, « au cas où » je trouverais quelque chose (qui n’existe pas) – à la différence qu’ici, il y a réellement quelque chose, et il n’en faut pas plus pour me donner envie de tout explorer. D’ailleurs, je pense que c’est aussi une façon d’admirer le travail de titan effectué sur les paysages que de regarder chaque mètre carré de l’immense map !

« Est-ce que je peux aller là ? Est-ce que je peux aller là aussi ? Au fond du ravin ? Sur le caillou ? L’ilôt ? ». De base, la map m’intrigue beaucoup donc avoir une « raison » de tenter n’importe quoi, c’est trop bien. C’est complètement con, mais ça m’a fait retrouver mon âme d’enfant et ça me détend de juste allumer la console pour me balader et farfouiller.

Bref, après dix-huit ans, j’aime enfin Shadow of the Colossus, mais peut-être pas pour les raisons attendues [les colosses]. Néanmoins, je me suis prise au jeu (au point de vouloir tenter le platine !) et je comprends à présent l’engouement autour, même si je déteste toujours autant les boss de jeux vidéo. J’ai l’impression d’avoir énormément de temps perdu à rattraper, et je compte bien le poncer le plus possible tant que j’ai envie d’y jouer. (Je suis extrêmement intriguée par le jardin secret et les items bonus obtenus par les time attacks…)

Comme quoi, tout arrive !

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